In Extremis : Marie revalorise le pain invendu en biscuits gourmands

In Extremis : Marie revalorise le pain invendu en biscuits gourmands

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Les biscuits In Extremis ont un délicieux petit goût torréfié et une texture bien croustillante. Pourquoi donc ? Simplement parce qu'ils sont fabriqués avec de la poudre de pain invendu. C'est la démarche de Marie Eppe : concocter des petits gâteaux pour le petit déjeuner et l'apéritif à partir d'une matière destinée à être jetée... Mais bien sûr, ces gammes "anti-gaspi" n'oublient pas d'être gourmandes, saines et Made in France ! Portrait de cette ingénieure agroalimentaire engagée dans la lutte contre le gaspillage alimentaire.
In Extremis

Découvrez les biscuits anti-gaspi In Extremis !

C’est au beau milieu de la nuit, entre le 1er et le 2 janvier 2019, que le nom de sa future marque a surgi dans l’esprit de Marie. Les séances de brainstorming n’avaient pas été très concluantes, mais voilà que l’expression parfaite réveille la toute jeune diplômée. Ce sera In Extremis, un choix à double sens : parce que l'entreprise “va sauver et revaloriser un aliment, le pain, juste avant qu’il ne soit gaspillé. Et parce qu’il est temps de prendre soin de la planète… Avant qu'il ne soit trop tard”

Avant cette belle idée nocturne, le projet mûrissait en réalité depuis quelque temps déjà. Marie Eppe a grandi en Meurthe-et-Moselle, à la campagne. “Très jeune, j’ai été sensibilisée à l’alimentation locale et de saison. On avait un potager, on mangeait du fait maison avec les fruits et légumes du jardin”, raconte-t-elle. Après le lycée, elle enchaîne avec un DUT Génie biologique santé, option analyse biologique et biochimique. Un parcours qui lui donne envie de se spécialiser dans la santé nutritionnelle. 

Biscuits aux noix In Extremis
Les biscuits pour le petit déjeuner aux noix / In Extremis

La suite ? Une école d’ingénieur agroalimentaire, à Nantes. “C’est là que j’ai commencé à vouloir entreprendre, pour redonner du sens à notre alimentation. Ce qui me tenait à cœur, c’était avant tout l’aspect nutritionnel et l’origine des produits. J’ai d’ailleurs fait des stages et des projets étudiants alignés avec cela. Mais j’ai aussi pris conscience peu à peu de la face cachée du gaspillage alimentaire. Celle qui se déroule en amont de la commercialisation, au moment de la production et de la transformation. J’ai donc cherché à mêler tous ces aspects…”, explique Marie. 

J’ai pris conscience peu à peu de la face cachée du gaspillage alimentaire. Celle qui se déroule en amont de la commercialisation.

Démarche anti-gaspi

En septembre 2018, fraîchement diplômée, la jeune femme s’interroge. Faut-il se lancer maintenant ou patienter un peu ? “J’avais un syndrome de l’imposteur. Je me disais que je n’avais pas assez d’expérience. Mais en même temps, je n’avais rien à perdre… Et la planète n’a pas le temps d’attendre”, se souvient-elle. Dès novembre, elle commence donc à cogiter sur sa future entreprise, tout en travaillant comme employée polyvalente dans un magasin bio. 

“Je voulais faire avec ce qui existe déjà, dans une démarche zéro déchet. Je me suis donc intéressée aux matières, aux pertes alimentaires, aux co-produits. En France, les aliments les plus gaspillés sont les fruits et légumes et les céréales, notamment le pain”, note Marie. En effet, le gaspillage de pain représente 4,5 kg par an et par personne. Elle s’oriente vers ce dernier, pour privilégier la sécurité et la qualité alimentaire. Comment donner une seconde vie à cet aliment de base ? La jeune créatrice commence à faire des tests dans sa cuisine, sécher, broyer et incorporer cette matière récupérée dans des recettes. Très vite, elle fait le choix des biscuits : “à la base, je ne suis pas consommatrice, parce que l'offre ne correspond pas à mes besoins : trop riche, trop sucrée, suremballée. Je me suis donc dit que je n’étais pas la seule !”.

Un petit déjeuner avec In Extremis
In Extremis

Co-création

Marie, qui avait déjà exercé sa plume sur un blog, d’abord pour raconter son séjour Erasmus en Irlande du Nord, puis pour parler de sa démarche de “consomm’actrice” anti-gaspi, crée une newsletter au printemps 2019. Elle y raconte son projet, partage ses avancées et ses difficultés… Tout en co-créant sa première gamme de biscuits pour le petit déjeuner : de la saveur générale au type de chocolat, sa communauté engagée donne son avis. En parallèle, Marie se fait accompagner par un incubateur, cherche des financements, réalise des analyses sensorielles et fignole ses recettes...

Elle trouve d'abord du pain à récupérer. Sa première solution, c'est de mutualiser les collectes avec une autre entreprise, dans l’Ouest de la France, auprès de boulangeries travaillant pour la restauration collective (annulations de commandes, problèmes de cuisson, de calibrage ou d’aspect…). Ces morceaux de pain prêts à être jetés sont récupérés et réduits en poudre par une entreprise de chapelure. Ils représenteront 20 à 25% du produit ! En plus d’être un ingrédient anti-gaspi, cette poudre, “plus épaisse que la farine, apporte une croustillance différente et un bon goût torréfié”.

La poudre de pain, plus épaisse que la farine, apporte une croustillance différente et un bon goût torréfié.

Biscuits pour le petit déjeuner anti-gaspi aux pépites de chocolat / In Extremis
Biscuits pour le petit déjeuner anti-gaspi aux pépites de chocolat / In Extremis

Farine, son de blé, sel de l'île de Ré, noix du Périgord… Tous les ingrédients sont produits en France, sauf le chocolat (et aujourd’hui l’huile de colza européenne). De plus, comme l’idée est d’imaginer des gourmandises “bonnes pour la planète et la santé”, Marie soigne l’aspect nutritionnel. Les biscuits “répondent à nos besoins pour démarrer la journée. Ils sont riches en fibres et peu sucrés". De plus, il y a peu d’ingrédients, “et pas de produits superflus, pas d'additifs. On pourrait les refaire chez soi !”.

Biscuiterie bretonne

Au printemps 2020, Marie quitte son emploi salarié et créé l’entreprise en bonne et due forme. “Trouver une biscuiterie partenaire a été un chemin long et compliqué. Beaucoup d’entreprises étaient réticentes : un produit qui n’existe pas, un ingrédient qui fait peur, de trop petites quantités…”, dit-elle. Fin août, elle rencontre finalement un atelier breton, partant pour se lancer de l’aventure du biscuit anti-gaspi. 

Les biscuits pour le petit déjeuner répondent à nos besoins pour démarrer la journée. Ils sont riches en fibres et peu sucrés.

Juste après, au début du mois de septembre 2020, sa campagne de financement participatif sur Ulule démarre, avec ses trois premières recettes : Pépites de chocolat noir, Éclats de noix et Soupçon de miel. “Les préventes [au final, 1209, sur un objectif de 100 ! ndlr] m’ont permis d’avoir des fonds pour lancer la première fabrication et de montrer que des contributeurs croyaient au projet”. Après plusieurs tests, les premiers biscuits sont officiellement fabriqués début décembre. En janvier 2021, après des préparations de commandes festives en famille, les premiers sachets (en papier recyclable !) sont envoyés et la boutique en ligne lancée.

Une tonne de gaspillage évitée

Biscuits Salés In Extremis
Les biscuits apéritifs / In Extremis

En octobre 2021, In Extremis dévoile ses premiers biscuits apéritifs : graines de tournesol et piment d'Espelette, Oignon et origan de Provence. Autre gros chantier : la “démarche d’internalisation” de la collecte et de la transformation du pain, dans l’Est de la France. Marie commence à récupérer des invendus de boulangeries locales (autour de son QG de Lunéville), artisanales et bio… Et à sécher (avec un déshydrateur ou un four, pour ôter toute humidité) et broyer le pain, pour le moment dans un local loué, une halle de technologie d’une école d’agroalimentaire. Le but, c’est de se “réapproprier le projet, gagner en autonomie et en réactivité”. Et aussi, de labelliser dès que possible les gammes en bio : la plupart des ingrédients le sont déjà… Mais pas encore la poudre de pain. C'est en cours ! Cela va demander quelques autres adaptations, comme peut-être le choix d’un miel bio européen, la version française étant très coûteuse. 

Aujourd'hui, la fondatrice travaille avec deux alternants, Simon pour le démarchage commercial et Nathalie pour la création de la filière de pain invendu bio et d'un futur atelier de la marque. Ouvrir un local de transformation du pain, c'est le gros projet d'In Extremis pour 2022 ! Marie, 26 ans, aimerait aussi lancer une nouvelle gamme de produits anti-gaspi "qui touchera une clientèle cible complémentaire à celle d'aujourd'hui"

On récupère le son de blé, peu valorisé dans l’alimentation humaine, auprès des meuniers. On utilise aussi des cerneaux de noix invalides, trop cassés pour être vendus tels quels.

Autre idée de l'entrepreneuse : optimiser les outils pour sécher et broyer d'autres pertes et co-produits alimentaires, pas uniquement du pain… À suivre, donc ! En tous cas, on peut dire que la marque est efficace : “On récupère le son de blé [l'enveloppe protectrice du grain, ndlr], peu valorisé dans l’alimentation humaine, auprès des meuniers. On utilise aussi des cerneaux de noix invalides, trop cassés pour être vendus tels quels. Avec la poudre de pain, cela représente ⅓ de nos recettes". Ainsi, en novembre 2021, cela correspondait déjà à une tonne de gaspillage évitée... In Extremis.

Découvrez les biscuits In Extremis pour le petit déjeuner et l'apéritif !

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À propos de l'autrice
Lucie de la Héronnière
Responsable éditoriale
Lucie a travaillé pendant une dizaine d'années pour la presse et l'édition. Sa spécialité ? L'alimentation et ses enjeux. Pour Bien ou Bien, elle plonge désormais dans toutes les facettes de la consommation responsable.

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